Léopoldine Hugo 1824-1843

Demain, dès l’Aube… Biographie de Léopoldine Hugo

Que sait-on de Léopoldine Hugo ?
Qu’elle était l’aînée des enfants de Victor – c’est faux.
Qu’elle eut avec son père une relation fusionnelle étouffante  – c’est vrai.
Qu’elle inspira ses plus beaux poèmes – exact.
Qu’elle mourut noyée, à dix-neuf ans, au cours d’une sortie en barque – exact aussi.
Que ce drame était imprévisible. Imprévisible, vraiment ?

La vérité, révélée par l’enquête d’Henri Gourdin, c’est que le mari de Léopoldine, barreur et régatier averti, embarque ses passagers dans un canot conçu pour la course en mer, charge des lests mobiles en fond de coque, borde les voiles et amarre les écoutes à l’heure du mascaret.

Henri Gourdin propose une biographie émouvante d’une des figures les plus énigmatiques de notre littérature, inspiratrice de Demain, dès l’aube et des Contemplations. Et une plongée au cœur du « goum » d’Ego Hugo.

 Sont les trois premiers mots et le titre, d’un poème de trois quatrains d’alexandrins en rimes croisées publié par Victor Hugo dans le livre IV – Pauca mae, de son recueil Les Contemplations :

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Il exprime la douleur persistante causée par la mort accidentelle de sa fille, le 4 septembre 1847 à Villequier, une bourgade de l’estuaire de la Seine en aval du Havre. Circonstances moins connues : il a répondu à l’invitation pressante de sa fille en venant passer une journée au Havre, s’est dispensé d’assister à l’enterrement et en a dispensé d’autorité la mère, les frères, la sœur de la défunte.

Le livre IV des Contemplations décrit l’histoire d’Hugo avec sa fille, en trois temps : souvenirs de l’enfance, désarroi devant la mort, consolation religieuse avec Mors (« Tout était à ses pieds deuil, épouvante et nuit. / Derrière elle, le front baigné de douces flammes, / Un ange souriant portait la gerbe d’âmes ») et Charles Vacquerie (« Dans l’éternel baiser de deux âmes que Dieu / Tout à coup change en deux étoiles ! »).

Compositions merveilleuses, comme souvent chez Victor Hugo, et décalées de la réalité, comme très souvent chez Victor Hugo. C’est le point de vue que je défends dans Demain, dès l’aube, biographie de Léopoldine.

Hugo, bon père ?

Le poème est connu par son premier ver et le sujet par sa légende, plus répandue que sa vérité. Un exemple tout frais, à propos de la fin tragique de Léopoldine : « Elle venait de se marier avec Charles Vacquerie. Elle portait son enfant  … avec son mari et deux de ses amis » (Sébastien Spitzer, Dictionnaire amoureux de Victor Hugo, Plon, 2023).

Deux bobards en deux lignes suivis de longues citations des délires romantiques de Victor Hugo et de son ami Alphonse Karr. Et pas un mot, dans les six pages de l’entrée « Léopoldine » sur les écueils de sa relation avec son père. Il n’est question que d’« enfant choyée », de « miracle de la vie », de « Hugo est bon père ».

Bon poète peut-être, politicien courageux certainement, défenseur des monuments historiques bravo ! Mais bon père non, pas d’accord !

La célébrité du poème l’a conduit dans les chansons de :

• Pierre Perret
• Les Frangines
• Amanati
• Christophe Bourdoiseau
• Henri Tachan
• Pierre Bensusan
• Andrea Lindsay
• Marc Robine
• Les Sales Majestés
• Les Kitchs
• Elie Semoun
• Anne Sila
• François Léveillée…

et sur les pages de :

• Vincent Rivasseau (Les Dossiers d’Aquitaine, 2008)
• Jacques Charpentreau (Poche jeunesse, 2015)
• Caroline de Bodinat (Flammarion, 2023)
• Isabelle Le Nouvel (Michel Lafon, 2023)…